La fin du primaire et le début du collège, c'est une période où la question des choix commence à se poser. C'est un moment qui peut être violemment contradictoire, où les désirs d’autonomie et d’indépendance tendent à se heurter aux injonctions sociales et familiales, à la prise de conscience qu’on subit beaucoup les choix d’autrui.
La thématique du choix nous questionne et nous séduit aussi dans tout ce qu’elle peut comporter d’universel et de philosophique : oscillation constante entre vertige existentiel et sensation de liberté. 

 

     À partir de cette notion de “choix”, nous décidons d’explorer collectivement la théorie des univers parallèles. En la vulgarisant à l’extrême, on peut dire que cette théorie consiste à considérer qu’il n’y a pas qu’un seul univers mais plusieurs, qui coexistent dans des réalités différentes. Dans des espaces-temps étanches, ces réalités se déroulent les unes à côté des autres sans interagir (sauf si…). Pour citer le titre d’un ouvrage du chercheur Pierre Bayard, il s’agit de dire qu’il existe d’autres mondes…

    Il y a là un vertige qui nous semble être un outil ludique et efficace pour s’engager dans la création de fictions. Cette idée exaltante et effrayante que non seulement les choses pourraient être autrement mais qu’elles le sont. La moindre chose imaginée existe, dans un autre univers. Faites l’expérience : pensez à littéralement  n’importe quoi, et ce n’importe quoi  existe, dans au moins un des univers parallèles. Pendant l’enfance comme à l’âge adulte, il nous arrive souvent de nous demander comment les choses seraient si elles étaient autrement : si nous avions fait tel choix plutôt qu’un autre, si nous avions telle famille plutôt qu’une autre, si nous habitions ce pays-ci et non celui-là… Et si nous commencions maintenant à remplacer les « ou » par les « et » et que tous ces « et si ? » coexistaient au même moment ? 

 

    La théorie des univers parallèles nous semble constituer un formidable outil théâtral de liberté, d’imagination et d’émancipation. Les fictions littéraires ou cinématographiques qui prennent comme point de départ le voyage à travers le multivers abondent (pour n’en citer que quelques unes : le film récent et oscarisé Everything, Everywhere, all at Once,  À la Croisée des Mondes de Philip Pullman, la série Sliders (Les mondes parallèles), les romans de Philip K. Dick et bien d’autres œuvres de science-fiction…). Parce qu’elle permet une infinité de possibles simultanés, nous souhaitons nous inspirer de cette théorie pour explorer au plateau des enjeux à la fois intimes et universels, de l’infiniment grand (par exemple : à l’échelle de l’Univers) à l’infiniment singulier (par exemple : à l’échelle d’une bactérie). L’idée de nous emparer des possibilités stylistiques et formelles qu’elle ouvre (uchronies, utopies/dystopies, bifurcations et variations…) nous fait rêver à un spectacle ludique et poétique, où la question centrale du choix produirait une matrice d’imaginaires infinis.